8 novembre 2023 - "Le Désespéré" de Gustave Courbet

Texte N°1
Impossible !
J’en avais pourtant rêvé. A chaque fois que les morveux de la classe occupaient tout l’espace de la cour de récréation avec leur ballon. Lorsque je me faisais siffler en me baladant dans la ville le soir. Lorsque ma mère commençait une phrase en disant : « Si tu avais été un garçon, tu aurais pu... »
Oui, j’avais rêvé d’avoir des poils sur le torse, les bras musclés, la mâchoire carrée, la gueule du héros des films américains, celui que personne n’aurait osé embêter. J’aurais cassé les dents de ces crétins qui bousculent, qui intimident, qui volent, qui violent. J’aurais été pilote, mécanicien ou policier. Un corps masculin m’aurait ouvert tous les possibles.
Et voilà que je me réveillais dans une peau d’homme, une peau d’âne. Mon reflet m’était étranger. Seuls mes yeux effrayés et mes cheveux en broussaille, peut-être, étaient restés les mêmes.
Avais-je gagné en force ou en courage ? Etais-je plus libre à présent ? Pourrais-je soutenir le regard d’Emma sans bafouiller, sans rougir ? Affirmer enfin mes goûts et mes choix ?

 


Texte N°2
Voyant cet ahuri qui pleurait sur son sort, j’ai saisi l’occasion pour lui régler son compte.
Pauvre animal humain, tu n’en crois pas tes yeux ! Tu regardes hébété, tu doutes mais tu sais.
Depuis presque cent ans, la nature n’en peut plus de ta cupidité et elle a commencé à plus te supporter. Tu penses être un génie maître de l’univers. Humain tu l’as clamé dans des déclarations, pour l’amour pour la paix pour la fraternité. Grand donneur de leçons pleines d’indignation, tu excelles à blâmer le mal que d’autres ont fait.
Hier encore il y a cent ans, tu pouvais faire semblant de ne pas voir l’horreur que partout tu répands.
Aujourd’hui plus d’espoir dans tes yeux ébahis, la terre n’est plus qu’un cri sous ton ignominie.
Humain je me pensais, mais tout au fond de moi, je sens bien que mon chien est plus humain que moi.

 

Texte N°3
Oh, non ! Ce n’est pas possible ! Dites-moi que je me trompe, que j’ai une hallucination ; la réalité ne peut quand même pas dépasser la fiction ! Cet énergumène aurait réussi à faire tout cela malgré le froid, le vent et l’environnement hostile ! Il a déjoué toutes les difficultés sans se départir de son calme et il a vaincu un ennemi redoutable. Son efficacité et sa rapidité resteront dans les mémoires. Je suis obligé d’admettre qu’il faut aussi saluer le courage et la bravoure dont il a fait preuve. Je n’en reviens pas… moi qui pensais qu’il était bien incapable d’une action d’éclat, me voilà sacrément surpris ! Si on m’avait demandé mon avis, jamais je ne l’aurais choisi pour intervenir dans cet inextricable imbroglio. Me voilà bien embêté… Je vais être obligé de revoir tous mes projets pour tenir compte de son implication dans cette affaire, et ça ne m’arrange pas car j’avais bien l’intention de le laisser de côté ! Je ne peux pas aller à l’encontre de sa nouvelle réputation qui fait de lui un héros reconnu !

 


Texte N°4
Mon ami, grand artiste peintre m'a proposé de faire le point sur ma vie. Pour cela je me suis mis face à un miroir, pas très grand, format paysage et non format portrait.
Que cherchais-je ? 

La lumière vient de ma droite, je me regarde dans les yeux, je me fais peur. Qui suis-je ? Que fais-je ?
Je ne me reconnais pas, je suis affligé, désespéré. J'ai des hallucinations. Je tente de m'arracher les cheveux avec mes doigts crispés. Je suis proche du désespoir.
Néanmoins, dans 11 ans je vais découvrir l'origine du monde.

 

 

Texte N°5
Pardon ?! Quoi ?! Mais qu'est-ce qu'il se passe ? J'ai fait un petit vœu innocent de rien du tout et me voilà transformé. Je voulais juste ne plus avoir de calvitie moi !
De ce côté-là, à priori, ça a marché. Mais pourquoi a-t-il fallu que j'aie cette petite moustache qui gratte et ce bouc ridicule ? Et mes oreilles ! Quelle horreur !!! Saleté de gnome ! Mon oncle m'avait bien dit de m'en méfier.
Et, mais... Combien je mesure là ? Oh par la Grande Dame... J'ai le vertige ! Ce n'est pas possible : je suis devenu humain ! Une de ces affreuses créatures immenses, qui ne regardent jamais ce qui les entoure. Non, non, non !
     - J'étais un lutin beau gosse et voilà ce que je suis devenu. Plutôt devenir un troll que rester comme ça, dis-je en grommelant.
     - Ok, fit une petite voix aigrelette.
Oh non, pas ça ! ...